dimanche, 27 mars 2011
Les scènes-cultes : The West Wing, ép. 2.22 "Two Cathedrals"
La Saison 2 de The West Wing est restée dans la continuité de la Saison 1, une série d’une exceptionnelle qualité d’écriture et d’interprétation. Mais pour la fin de cette saison 2, Aaron Sorkin s’est surpassé et a décidé de marquer un grand coup. Ainsi, celle-ci est marquée par un crescendo émotionnel qui ne connaîtra pas de fin avant que ne se termine l’épisode “Two Cathedrals”, véritable petit bijou d’écriture et de réalisation précieux joyau comme la télévision nous en offre finalement encore trop peu...
La Saison 2 s’était ouverte par un double-épisode pilote riche en flash-backs, et l’épisode concluant la même saison aussi. A l’occasion d’un événement tragique, et à l’image plus tard de LOST, la série nous fait voyager entre le Bartlet de maintenant, le Président des Etats-Unis, et l’adolescent qu’il était autrefois, éclairant alors d’un jour nouveau Jed Bartlet. Comme un autre leader plus tard,(Jack Shepard), on découvre qu’il a eu des mots, une relation difficile avec son père. D’où les 2 cathédrales du titres, celle de l’université catholique dans laquelle Jed a fait ses études, et celle du présent où se retrouve le Président Bartlet.
Mais l’une des scènes-cultes dont on parlera ici concerne un autre “père”. Il faut bien le reconnaître, la Saison 2 n’a pas beaucoup épargné le Président Bartlet, le confrontant à des décisions de plus en plus difficiles à prendre, et à de nombreux drames, car dans la vie, on ne peut pas toujours gagner. Société judéo-chrétienne oblige, reposant sur une religion ayant construit la plupart de ses dogmes et son discours sur la notion de culpabilité (quand le malheur s’abat sur nous, l’une des réactions que l’on a en général, c’est “ pourquoi est-ce que ça m’arrive à moi ? Qu’ai-je fait pour ‘mériter’ tout ça ? “ ), en retour (de bâton), on a tendance à s’en prendre à “notre père qui est aux cieux“, Dieu lui-même, l’accusant d’agir contre nous, d’être responsable, de nous punir ou nous faire souffrir. C’est ainsi que réagit Jed Bartlet. Dans un monologue magnifiquement écrit et mis en scène, interprété avec brio et maestria par un Martin Sheen habité (j’avais lu je ne sais plus où que la scène constituait un tour de force de la part de l’acteur, et c’est le cas), qui s’en prend à ce “salop” de Dieu qui lui a pris beaucoup. Par la force même de ce monologue, la scène parvient à faire “exister” Dieu, à lui donner du corps.
L’écriture d’Aaron Sorkin, brillante, souffrait pourtant de certains tics que l’on commençait à cerner en étant attentif : confronter les personnages à de telles situations de crise qu’à force de se retenir, ils en finissent par exploser à la fin. C’est en général le schéma qu’adoptait chaque épisode de la saison 1, schéma dont la saison 2 avait fini par se détacher. Et c’est en général Jed Bartlet qui faisait les frais, le spectateur ayant eu l’occasion de le voir exploser de nombreuses fois. Ici, pourtant, dans cette scène, la colère est mesurée, pondérée : loin de partir dans des éclats de voix de rage, vociforant, c’est un Bartlet en apparence très calme, presque résigné, qui n’explose pas, mais n’ne exprime pas moins sa révolte. Paradoxalement, son monologue n’en acquiert que plus de force, et marque durablement les esprits. Avant de se terminer par un coup de talon rageur, écrasant une cigarette allumée par provocation afin de souiller les lieux. Bartlet règle d’une certaine façon ses comptes avec Dieu, avant de plus tard… régler ses comptes avec son propre père. Ecriture particulièrement brillante de Sorkin, disai-je plus haut.
Mais l’épisode n’en a pas fini avec le spectateur : un autre rendez-vous, avec le destin, doit avoir lieu. Et deux autres scènes anthologiques se succèdent : alors que la tempête fait rage, une tempête tropicale inhabituelle, Bartlet a un dernier échange avec une vieille connaissance. Qui trempera sa détermination dans l’acier au point qu’elle soit définitivement inébranlable. Car un dernier choix, crucial, capital, hante de plus en plus les esprits à la fin de la saison 2 : Bartlet doit déterminer s’il brigue un nouveau mandat, ou laisse la place à un autre. A la fin de la scène, c’est un Bartlet transfiguré qui affronte la tempête sans sourciller comme si elle glisser sur lui. Et s’apprête à annoncer sa décision au peuple américain. On suit alors le parcours conduisant le cortège présidentiel à la conférence de presse sur l’air de “Brothers in arm” de Dire Strait.
Et donc que dire de la scène clôturant la saison 2 : Bartlet se présente face aux journalistes, observé par ses fidèles et loyaux hommes, véritable armée dévouée à son service : C.J., Toby Ziegler, Josh Lyman, Sam Seaborn, et Leo McGarry, qui adresse aux spectateurs mais aussi à un de ses hommes un “ watch this “ s’il en était besoin. Bartlet devait d’abord se laisser interroger par un journaliste chargé de poser la première question ? Il n’en fera finalement rien, et se laissera poser LA question qui est sur toutes les lèvres dans l’univers de la série. Question à laquelle il répondra, retrouvant ainsi le jeune Jed Bartlet qu’il fut autrefois… Le sourire aux lèvres et les mains dans les poches.
11:08 Publié dans Les Scènes-cultes des séries, The WEST WING | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : the west wing, jed bartlet, martin sheen, religion, aaron sorkin, histoire des séries tv américaines
dimanche, 20 mars 2011
Les Scènes-cultes : The West Wing, épisodes 2.13 "Bartlet's Third State of the Union” et 2.14 “The War at Home”
Les Sériephiles ont du le comprendre à force de regarder des séries, lorsqu’on arrive au milieu de la saison, certaines d’entre elles décident de frapper un grand coup et proposer un dyptique, une histoire ou plusieurs intrigues (quand c’est le cas d’une série-chorale) s’étendant sur deux épisodes, avec des cliffhangers à la fin du premier épisode, à la manière des season finale. Cela permet de préparer en général la fin de saison, justement, et de relancer celle-ci en la boostant un peu.
Dans le cas de The West Wing, le showrunner Aaron Sorkin a décidé d’entremêler plusieurs intrigues et de plonger ses personnages au coeur de différentes crises. C’est le cas notamment du Président Jed Bartlet, qui voit quelque peu le ciel lui tomber sur la tête et porte le poids de l’aspect dramatique de la série en grande partie ici. Alors qu’il vient de prononcer avec succès son discours annuel, cela crée une crise conjugale avec son épouse Abby : celle-ci a vu d’un mauvais oeil les coupes opérées au dernier moment dans son discours, qui prépare l’annonce de sa candidature à sa propre succession, alors qu’il était convenu entre eux, à cause de la maladie de Bartlet, que celui-ci ne se représente pas. Encore plus dramatique, des agents des narcotiques en Colombie ont été capturés par un Cartel qui compte les échanger contre la libération d’un de leurs chefs. D’où des décisions difficiles à prendre, et de nombreuses réunions avec l’état-major.
Pour alléger le climat quelque peu tendu de ces scènes, et parce qu’on est quand même face à une série ayant toujours tenté de mêler les registres et qui reste du divertissement, on ressort la malheureuse Ainsley Hayes du placard. Belle jeune femme blonde, brillante, républicaine, arrivée dans la série au début de la série, elle s’était vue attribuer un bureau au sous-sol, près du circuit de chauffage de la Maison Blanche. Un bureau isolé, à la manière du bureau des Affaires non-classées de l’Agent Mulder. Où on l’y avait laissé après quelques épisodes pour ne plus du tout l’utiliser. Aaron Sorkin, mine de rien, aura lui aussi été prompt à kelleyriser certains personnages. Le personnage réapparaît donc à l’occasion de ce dyptique, donc, mais pour être l’objet de scènes comiques savamment préparées, sans qu’on sans doute, la ridiculisant plutôt qu’autre chose.
Oh la loose !!, part. 1 (ép. 2.13 "Bartlet's Third State of the Union") : On se souvient donc du personnage, mais aussi du fait que Ainsley n’a finalement jamais rencontré le Président Bartlet en personne. Il est donc temps que les deux personnages se voient de visu. Ainsley fait partie des personnes travaillant pour la Maison Blanche invitées à débattre du discours de l’Union du président. Toujours aussi efficace, et quelque peu grisée, celle-ci, après le discours, se détend dans son bureau. En peignoir, puisqu’une histoire de banc repeint récemment, fait que celle-ci se retrouve sans vêtements convenables. Et un verre de cocktail alcoolisé à la main, en train de danser sur de la bossa nova. C’est justement le moment que choisit Sam Seaborn pour lui rendre visite, ainsi que… Le Président Bartlett. C’est la honte pour Ainsley, bien sûr. epic fail, comme dirait Nephthys. Mais le spectateur est mort de rire en voyant arriver Bartlet, face à une jeune femme gaffant involontairement, à la manière d’une Ally Mcbeal.
Oh la loose !!, part. 2 (ép. 2.14 "The War at Home") : Ainsley veut sa revanche. Une autre chance de rencontrer le Président, cette fois à son avantage, afin de réparer la bourde, de se montrer digne de ses parents. Elle demande à Sam une autre entrevue. Ce qu’il lui accordera bien sûr. Ainsley et Sam se retrouvent donc dans le bureau de Léo, lieu propice à la rencontre, Mais la jeune femme, tellement neurveuse, a une irrépréssible envie de passer aux toilettes. Elle s’échappe donc, mais la malheureuse a confondu les toilettes, et… le placard à balai. Au moment où le Président entre dans le bureau de Léo pour la rencontrer à nouveau. Bien entendu, Ainsley, morte de honte, hésite à quitter son placard, d’autant plus qu’on entend très bien des deux côtés de la porte. epic fail, X 2. Sic. Le plus humain des présidents aura tout de même quelques mots rassurants pour la jeune femme, lui rappelant à quel point ces parent peuvent être fiers d’elle, et combien elle est brillante. En attendant, le spectateur aura bien ri. A ses dépens, hélas…
11:48 Publié dans Les Scènes-cultes des séries, The WEST WING | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : the west wing, à la maison blanche, aaron sorkin, kelleyrisation, sam seaborn, ainsley hayes, jed bartlet, histoire des séries américaines, scénes-cultes
mercredi, 16 février 2011
Ally McBeal : Souvenirs, et réflexions, autour de la série...
Aux Etats-Unis a débuté récemment Harry’s Law, une toute nouvelle série de David E. Kelley, un des plus brillants scénaristes de séries des années 90. Et dans les coulisses du monde des séries, on annonce un projet de remake de Wonder Woman chapeauté par l’homme, qui verrait le retour sur les écrans de la belle Amazone. Je n’ai pas encore jeté un oeil à Harry’s Law, mais je me suis replongé récemment dans Ally McBeal, l’une des premières séries-phares de Kelley, une des séries des années 90 qui m’avait le plus marqué. Une série dont je me suis désintéressé progressivement, et que je n’ai plus regardé ensuite… Jusqu’à il y a peu. Donc, quelques réflexions et souvenirs autour de la série.
L’évolution de la série, mon parcours avec celle-ci.
En y repensant, et pour faire le lien avec une autre de mes séries préférées, Ally McBeal a connu une évolution relativement sensible à celle de Mission : Impossible : une première saison où la série se cherche, cherche son identité, malgré des flamboyances, passages réussis augurant de la suite. Puis 2 saisons fort réussies, avant que la série ne commence son déclin progressif pour les Saisons 4 et 5. C’est en tout cas, l’image que je m’étais fait de la série dans mes souvenirs. Sauf bien entendu que Mission : Impossible aura duré 2 saisons de plus.
Et donc je me souviens avoir véritablement accroché à la série à la fin de la saison 1, trouvant ses excentricités géniales, pour ne plus la lâcher et suivre religieusement les diffusions de la série le jeudi sur M6 jusqu’à… la Saison 3. La série a ensuite perdu de son intérêt pour moi, la faute à une Callista Flockhart effrayante de maigreur dans la Saison apparue comme l’ombre d’elle-même. La faute à une série commençant à s’épuiser d’elle-même. La faute au début de la Kelleyrisation galopante de la série : on fait sortir des personnages de son chapeau pour revitaliser la série, mais sans rime ni raison, et surtout sans vraiment nous expliquer les raisons de leur présence, au point que le procédé, libre de toute excuse ‘formelle’, devient transparent. Malgré un personnage bien trouvé et pensé incarné par un acteur ayant connu une belle traversée du désert, Robert Downey Jr, plus connu désormais pour le renouveau de sa carrière au cinéma dans des rôles-clé et principaux de films blockbuster. Et une dernière course à la Guest pour la saison 5, où on parlait plus, toujours dans mes souvenirs, des acteurs invités dans la série que des intrigues de celle-ci : Heather Lockhart, Christina Ricci, Jon Bon Jovi... Ainsi que le départ progressif des personnages emblématiques, les uns après les autres, de la série. Côté intrigues, là encore, on pouvait sentir la fin prochaine de la série : on se met à proposer à Ally ce après quoi elle semblait courir : une vie très conventionnelle correspondant au “modèle” de nos sociétés, ce vers quoi on nous pousse inexorablement : un homme à épouser, une enfant, une maison… J’avoue que je ne me souviens que de loin de cette saison 5, ayant presque lâché la série durant la saison 4.
Flottements, hésitations… Ally McBeal, série aux multiples visages.
Ally Mcbeal est une série hybride, qui aura toujours oscillé entre plusieurs choses. Elle est l’oeuvre de Kelley, qui aura signé une bonne partie des scénarios de la série, rares étant les épisodes auxquels il n’a pas participé à l’écriture. C’est d’ailleurs une des dernières dans laquelle un scénariste se soit autant impliqué, du début à la fin, les autres exemples me venait en tête étant The West Wing et Babylon 5 (à partir de la saison 2). Comme Picket Fences avant elles, c’est une série difficilement résumable. Ou plutôt, on pourrait très bien la résumer à son pitch de départ, mais ce serait éluder, mettre de côté une bonne partie des éléments de la série.
Déjà, le titre fait penser à une série mettant en vedette un seul personnage principal. Deux grands types de séries existent, jusqu’aux années 90 : les séries avec un héros principal (ou un duo ou un trio, bien sûr) et quelques personnages très secondaires, croisés le temps d’une scène, voire pas du tout, et les séries proposant de suivre tout un groupe de personnages. On pourrait penser qu'Ally McBeal appartient au premier type, mais les personnages secondaires existent tout autant qu’elle. Si le générique de la Saison 1 ne propose que des images de l’héroïne, elle proposera des images des autres personnages par la suite.
Ensuite, Kelley ne conçoit pas des séries que comme des supports pour évoquer, mettre en scène des sujets de société, des thèmes dont il a envie de débattre, de façon pertinente. Comme dans The West Wing (décidément, la faute au fait que je refasse les deux dans le même temps), la série devient lieu d’échange, de débats d’idées, de lutte d’arguments. Il y a du coup une hésitation constante dans le ton de la série, tour-à-tour sérieuse, dramatique, puis comique, avec des situations ou des personnages extravagants. La série relève à la fois des séries dramatiques traditionnelles, mais peut glisser parfois dans des situations que l’on pourrait fort bien retrouver dans une sitcom. Et comme dans The West Wing, on ne peut savoir si un dialogue débouchera sur un moment de réflexion, moment de grâce, ou un moment purement comique.
J’ai parlé d’extravagance, donc parlons des personnages : ceux-ci sont excentriques, pour la plupart, c’est-à-dire marqués d’une douce folie, ou folie douce. Ally ne peut s’empêcher de traduire en images explicites les sentiments qu’elle ressent. Billy vient de lui briser le coeur, l’image nous montre des flèches transpercer un coeur. Un prétendant éconduit Ally, celle-ci se voit déversée d’un camion-benne directement dans les ordures. Pour Richard Fish, l’un des principaux associés, le patron d’Ally, il aime particulièrement caresser la peau de femmes mures sous le menton. Quant à John Cage, c’est une collection de petites excentricités à lui-seul : il ne prend la parole en audience qu’après avoir bu un verre d’eau fraîche qu’il s’est versé, prend des ‘moments’ en s’arrêtant soudain, a le nez qui siffle… Tout cela déroute l’auditoire… et le spectateur. Et ce n’est pas fini, Kelley s’ingéniant à inventer toujours autant de “doux dingues”, personnages à la frontière des normes, que ce soit physiquement, ou dans leurs habitudes. Du coup avec de tels personnages potentiellement comiques, on comprend aisément que la série, considérée comme une dramédie, soit difficilement classable. D’autant plus que l’on n’arrive pas toujours à deviner si les personnages sont sérieux, ou pas.
Philosophiquement, la série est tout aussi flottante. Kelley, homme de dialogues, homme d’écriture, s’est amusé à créer des petites phrases signifiantes, les personnages d’Ally McBeal se caractérisant par ce qu’ils disent du monde. Ally est une imperturbable et inguérissable romantique. Elle est une sorte de Mme Bovary moderne, sans l’aspect sombre et ‘romanesque’ du personnage. Toutes deux voient leur vie et leur recherche de l’homme idéal modelés par leur imaginaire : elles rêvent leur prochaine rencontre. Cela se traduit chez Ally par des McBealismes, sentences faisant part, liées à cette vision du monde. Bien entendu, le Prince Charmant n’existe pas. Sa quête est vouée à l’échec, elle ne peut aboutir. Notamment parce que cette ultime élément manquant au bonheur d’Ally marquerait tout simplement la fin de la série. L’Idéal échoue toujours, malheureusement, devant la réalité. Face à cela, on a Richard Fish, que l’on pourrait considérer, de loin, comme un ‘grand gosse’, prenant peu de choses de façon ‘dramatique"’. Mais Richard a un sens aigu des réalités, et un goût immodéré pour l’argent. Ce qui compte pour lui, c’est de vivre le mieux possible, en amassant le plus d’argent. Tout cela s’exprime dans des réflexions simples, les fameux… Fishismes. On pourrait le considérer donc comme cynique. John Cage, son associé, l’autre patron, n’est vu qu’au travers de ses plaidoiries, ses apparitions dans la série étant liées dans un premier temps aux affaires du cabinet. Du coup, on ne sait pas, dans la saison 1, ce qu’il pense véritablement. Celui-ci doit donc rappeler comme s’il en était besoin, que quand il plaide, il ne dit pas ce qu’il pense, mais donne le meilleur discours susceptible d’aider son client. Autrement dit, il ne prend la parole que pour dire ce pour quoi il a été payé ! Mais dans le même temps, compatissant, il demande à Ally de ne pas renoncer à son romantisme, de ne pas laisser le monde gagner. Personnellement, j’aurais tendance à dire que l’époque n’était pas propice à un personnage aussi fort que le Dr House, prêt à afficher un cynisme absolu face au monde et son hypocrisie. Cynisme incarné par des personnages que l’on ne prend pas totalement au sérieux, quelque peu victimes d’eux-mêmes. Du coup, le cynisme qui s’entend dans la série est modéré, supportable, et contrebalancé par ce discours qui permet à la série d’exister, et au public de la suivre. Tout comme celui de House par le fait que ses victimes en sont ridiculisées, ou par le fait que cela le fasse passer pour un salop cruel.
La Kelleyrisation, Billy à l’origine du mal (?)
J’avais déjà posté ici, lors de la première année d’existence du blog, une note sur la ‘Kelleyrisation’. Cette pratique consistant à ne faire aucun cas des personnages ou de l’attachement des spectateurs à eux qui peut être pénible, constituer un mal. Car on les fait apparaître, ou disparaître, au gré de ses fantaisies, sans donner d’explications au spectateur, les utilisant quand on en a besoin, les faisant disparaître s’ils ne servent plus. Je ne sais pas si dans Picket Fences, Kelley utilisait déjà le procédé, mais il fut peu utilisé au début de la série n’apparaissant que dans les saisons 4 et 5, les deux dernières de la série. Dans la première saison, on fait passer John Cage du statut de récurrent à régulier, et dans les saisons 2 et 3, deux personnages, Nelle Porter et Ling, incarnées par Portia de Rossi et Lucy Lyu, apparaissent. Mais ces deux personnages n’en remplacent pas d’autres, ils renforcent la distribution initiale, et on nous donne des explications quant à leur arrivée, leur présence.
Du coup, je me suis demandé si le phénomène n’était pas apparu au cours de la saison 3. Pour ceux qui voudraient découvrir la série, n’allez pas plus loin, ce sera SPOILER !!
Trois saisons. Il aura fallu 3 saisons pour que Kelley s’aperçoive qu’il tourne en rond avec Billy Thomas, personnage fade, lisse, trop gentil pour être honnête, mari parfait, ex-petit ami parfait. Le personnage appartient malheureusement à cette catégorie difficile du Prince Charmant insaisissable, qui n’existe finalement que pour faire vibrer le coeur de l’héroïne qui ne peut l’avoir. Angel, de Buffy, appartenait également plus ou moins à cette catégorie. Billy Thomas aura surtout existé à travers Ally, pour constituer un confident de certains tourments de la jeune femme, et pas pour lui-même. Du coup, Kelley est coincé. Il faut faire quelque chose du personnage. Alors on révèle sa face sombre : Billy, le gentil boy-scout, se révèle être un insupportable macho fini. Il change totalement, se teint les cheveux en blonds, engage 4 superbes jeunes femmes soumises pour aller partout avec lui, épater avec lui, s’affirmer en tant que mâle dominant, et machiste. Insupportable, je l’ai dit, pour les personnages féminins. Et peut-être aussi pour le public, qui ne suit pas, devant une transformation qui me semble être assez brutal (je n’ai pas le souvenir que le changement ait été progressif, gradué). Comme la sauce ne prend pas, une autre solution est… d’éliminer le personnage. On lui trouve une tumeur au cerveau, qui justifie ce changement de personnalité (et en même temps, dédouane le personnage). Billy et l’entourage comprennent que cet accès de machisme est né de cette tumeur, et Billy est un mort en sursis que l’on fera disparaître. Au grand dam des spectateurs et spectatrices.
Alors je me demande si, Kelley, devant ce “problème” rencontré avec le personnage de Billy, en faire finalement quelque chose, être “forcé” de le tuer, ne voyant pas quoi faire de lui, ne s’est pas dit que mieux valait utiliser les personnages comme bon lui semble, les faire disparaître ou apparaître sans donner plus d’explications. Et si la Kelleyrisation, chez Kelley, ne serait pas née ainsi… De ce fameux Billy, dont on ne savait pas quoi faire, et qui aura connu la plus inutile évolution…
13:07 Publié dans ALLY McBEAL | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : ally mcbeal, richard fish, john cage, billy thomas, mcbealisme, fishisme, the west wing, mme bovary, kelleyrisation, histoire des séries télévisées, dr house